bonjour,
Mon travail me pèse beaucoup en ce moment car j'enrage de voir comment on travaille actuellement auprès des ados avec lesquels je travaille et je ne dis rien pour ne pas abimer mes relations avec l'équipe et mes cadres (collègues depuis 1 an et demi) à tel point que parfois j'aimerai démissionner alors que j'adore mon travail. Est ce un manque de confiance en moi qui peut ne pas me permettre de partager sereinement et courageusement ma vision des choses sur le travail que nous effectuons (je suis éducatrice en aba mais je travail dans une structure à tendance psychanalyste où nous avons fait le pari de nous mélanger: je suis la seule comportementaliste). Je trouve difficile de choisir entre relationnel avec mes collègues éducatrices et infirmières et qualité du travail auprès de nos ados avec autisme... Mais je ne supporte plus ces attitudes qui vise à accompagner l'autre sans le respecter et par dessus le marché d'avoir des discours sur le respect de 3 km de long... On parle on parle, on regarde le carnage institutionnel mais j'apprécie tout de même fumer une cloppe ou boire un café avec mes collègues de temps en temps. J'ai l'impression d'être en porte à faux à me rendre obligée d'écouter des discours sur des théories que je ne supporte pas et pourtant que j'avale pour leur faire plaisir parce que j'aime bien mes collègues...
La situation devient inextricable: dois je m'exprimer et dire ce que je pense sur les prises en charge de nos ados? Donc ma question est: est ce un soucis d'estime de soi qui peut me mener à cette situation, je ne sais plus quoi faire, merci

Vaste sujet que le monde professionnel.
D'autant plus sensible ici où la "matière" est humaine.

C'est toujours l'ambivalence entre se confondre dans un moule collectif et s'affirmer. Trop s'affirmer et on finit par être border-line, voire hors-sujet, ne pas s'affirmer et on n'existe plus.
Il faut trouver le bon point de fonctionnement.

Je finirai de répondre plus tard, pas trop le temps, là.
Désolé.

Bmagj

... Je continue donc.

Pourquoi opposes-tu relationnel avec tes collègues et qualité de ton travail ? Est-ce si antinomique ?

Une autre question : tu reproches à tes collègues de ne pas respecter vos ados autistes, par quoi cela se traduit-il ?

Nous entendons souvent parler dans des milieux médicaux du manque de respect du patient, à plus ou moins juste titre d'ailleurs, cela dépend des institutions. J'ose espérer que ce n'est pas le cas chez toi. Je veux dire que parfois, des gens touchés, émus par la détresse de leurs patients utilisent un certain vocabulaire pour dédramatiser la situation, cela les aident à se sentir mieux, et ce n'est pas pour cela qu'ils ne respectent pas les patients. D'autres ont besoin de ne pas trop s'attacher, pour continuer à avancer, et ne pas se morfondre en voyant la détresse des gens.
En fait chacun a une façon de réagir qui lui est propre, et qui peut offusquer autrui. Toi tu as l'air de prendre ton travail à cœur, c'est tout à ton honneur, tu t'attaches à ces ados autistes, et peut-être que tu ne comprends pas comment certains de tes collègues ne puissent pas avoir autant d'attachement.

Je vais te prendre deux exemples réels, deux amies que je connais bien.

La première est infirmière, elle travaille à l'hôpital avec des enfants, notamment des grands brûlés. Elle m'a dit un jour qu'elle est obligée de mettre des barrières entre elle et ses petits patients, sinon elle ne pourrait pas s'en sortir, à la perte de l'un d'eux notamment, ce qui arrive.
La deuxième est institutrice, elle a un enfant autiste dans sa classe cette année. Elle s'implique à fond dans le monde de son élève particulier, ne met aucune barrière. En en parlant avec elle, elle me dit trouver génial d'obtenir des résultats avec lui, je veux bien la croire. elle s'attache à lui. Je dis aussi qu'une désillusion peut arriver, et sans y avoir mis de barrière, on s'expose, et cela peut être dangereux pour son propre bien être. Je l'ai alertée sur le sujet, elle est d'accord avec moi, mais elle continue tout en étant consciente du risque.

En gros nous ne sommes pas égaux, chacun a son propre mode de fonctionnement ...

Si tout cela peut t'aider ...


bmagj

merci de ta réponse mais la situation est plus compliquée. Mes collègues sont de bonnes personnes au sens où elles veulent vraiment aider ces enfants... Le soucis est que nous n'avons pas la même formation sur l'autisme et l'irrespect n'est pas volontaire.
Par exemple certains enfants ne comprennent pas notre langage, et il y a des personnes qui vont lu poser un tas de question et discuter avec lui comme s'il était verbal "t'as fais quoi ce week end? comment va papa? dis, tu pourrais me répondre?! et là l'enfant crise et exclu tout adulte car ce langage est aversif.... Il ne comprend pas, et la tonne de question de langage qu'il se voit obligé de supporter le met en échec.... et l'abîme...
Ceci est un petit exemple, il y en a beaucoup d'autres (des cinquantaines par jour!), mais tout cela contribue vraiment à une agressivité massive et à l'automutilation destructrice. Tous les comportements sont renforcés: automutilation, violence, agressivité et tout le monde parle d'évolution de la pathologie, mais c'est une mauvaise prise en charge qui mène ces enfants à cela!, personne ne veut mettre de communication adaptée en route sur ces enfants non verbaux (pecs ou langue des signes).... Un outil de communication adapté régule bien ces enfants, j'en ai vu même se remettre d'une dépression grace à un outil de communication adapté.... Bref, cela m'énerve tellement, que j'ai pris la décision de retourner travailler en libérale... Je quitte le bateau, je n'en peux plus des méthodes archaiques d'un autre siècle qui rendent ces enfants si malheureux alos que des méthodes existent pour qu'ils aillent mieux et ne s'automutilent plus (plus efficace que les draps glacés et autre enballage "contenant" en tout genre....). Maintenant, je sais où je dois aller et arrêter de me prendre la tête en cautionnant ce que je vois de tout cela. Oui mes collègues sont de très gentilles personnes, non je ne manque pas de confiance en moi, en fait j'ai pas envie de les blesser car elles sont sures de bien faire et cela m'embête de faire de cela un combat personnel. Je viens d'un stage d'un an dans une unité comportementaliste à Lille, et bien je suis capable aujourd'hui d'affirmer qu'il n'y a pas photo, ces enfants sont mieux pris en charge et beaucoup plus heureux avec les comportementalistes: ils sourient, ils rient, ils font plein de chose, là je suis face à des trucs morbides toute la journée: des coups, de la casse et du sang: ras le bol!...
Cela dit, merci de m'avoir répondue car j'ai cru un instant que c'était moi qui déconnais dans tout cela!! Mais c'est le système de formation de ces personnes qui est pourrie jusqu'à la moelle!
Ladodo

Bien, heureux de t'avoir rendu service .... même si mes réponses ne sont pas de grande utilité ici.
Je reprend un peu ce que j'ai dit en premier : s'affirmer dans le monde du travail : quel mal à dire à untel ou untel la façon de procéder, etc ... bien sûr en y mettant les formes. Tes (ex) collègues n'ont pas eu la chance d'avoir ta formation, et bien tu aurais pu leur en faire profiter, ou alors tu juges l'ampleur de la tâche trop grande pour toi seule, ce que je peux concevoir.
D'une manière générale, dans le milieu du travail, n'importe quel travail, la méthode - le savoir - s'acquiert, puis se transmet. C'est mon point de vue, et pas seulement le mien.

A bientôt.

bmagj